http://lecrivaillonnne.skyblog.com/ Lécrivaillonnne: madame Bovary, c'est pas moi !

jeudi, juillet 13, 2006

madame Bovary, c'est pas moi !



Bon, si je vous faisais un post sérieux, pour changer ?
On va parler de littérature jeunesse. Je vous le dis pour que vous puissiez zapper directement si pas intéressés…
Alors, écrire pour les enfants…
C’est pas pour faire mon intéressante, mais c’est bien plus compliqué que d’écrire pour les zadules.

Je viens de regarder "les noces funèbres" de Tim Burton. Comme de plus en plus, ce genre d'oeuvre n'est pas destinée à un public ciblé. C'est pour enfants ET pour adultes. Tout le monde y trouve son compte. C'est un bijou d'écriture. Tout coule de source, tout est nickel, avec une créativité incroyable. Pareil pour des films comme Shrek, l'âge de glace... Scénar en béton !
Un écrivain jeunesse- adultes a dit " Quand j'écris pour les enfants, j'écris comme pour les adultes, mais en mieux".
Oui.
Quand j’écris pour les grands, comme maintenant, tiens, c’est plutôt fastoche : j’ai le bon mot, je le mets, j’ai la bonne formule, je l’emploie, je peux faire des digressions, des retours en arrière, des allusions, des ellipses… Franchement, c’est un parcours de santé, (non, c'est pas parce les concepts que je manipule sont de l'ordre de l'eau tiède et du fil à couper le beurre !).
Alors que l’écriture pour enfants est un peu plus complexe…
Il faut d’abord une vraisemblance à toute épreuve. Attention ! On peut partir dans un délire, mais une fois qu’il est tracé, il faut qu’il soit d’une logique sans faille. Si je décide que le géant est maladroit, je ne peux pas me permettre de lui faire vider le lave-vaisselle, ou alors ça devient tout le propos de l’histoire. Ca n’a l’air de rien mais la vraisemblance est souvent absente de la littérature adulte (si si, faites gaffe et vous verrez que les motivations des personnages sont souvent en désaccord avec leurs actes).
Ensuite, il y a des impératifs : la longueur. Aïe ! Ca fait mal ! Le nombre de bons gags que j’ai dû sabrer parce que sinon, mon album pour les 2/4 ans dépassait les 250 pages… Nan ! Direct à l’essentiel, pas de fioritures, on n’est pas là pour faire joli, on est au service de l’histoire, de cette andouille de géant qui sucre les fraises et du nain qui écoute son aventure… Si on délaie, on perd le fil…
Autre passage obligé : le vocabulaire, les structures de phrases… Là, mon boulot d’ortho m’aide bien… Je sais à peu près ce qui est compris par un enfant de deux ans. On dit : « le géant mange la souris » et pas » la souris est mangée par le géant », même si c'est pas gentil de manger les tites souris.
Si je veux mettre du vocabulaire compliqué ou plus juste, ou plus intéressant, ou édifier le nain je ré-flé-chis : je veux bien mettre « destrier », mais faut qu’il y ait un dessin de cheval, ou que le sens soit évident dans le contexte, ou inciter le gamin à poser la question…
Pas de digressions, pas d’ellipses, de flash back ou alors, exprès ( « le rendez-vous de la petite souris » fonctionne comme ça, mais on en a causé des heures, avec l’éditrice et l’illustratrice)…
Et puis, il faut que l’enfant avance. Que l’histoire apporte quelque chose, au-delà du plaisir ( qui est le plus important). Mais si le héros n’a rien appris, si ça ne lui a rien renvoyé de ses propres préoccupations, le minot va vite se lasser (et moi aussi). sans démagogie (trop facile les crottes de nez et le caca-boudin), sans être moralisateur, sans avoir un point de vue d'adulte non plus, juste une marche au-dessus de l'enfant, pour l'aider à monter...
Ce qui est agréable, c’est de se dégager de la liberté dans ces contraintes. C’est un peu le plaisir de l’alexandrin, quoi…
Après, une fois qu’on tient l’histoire, ça devient de la dentelle. Mot après mot. C’est la phase qui est la plus jouissive, après celle de la difficile naissance de la trame (souvent, dix ou douze versions, voui, m’sieurs-dames !).

En tout cas, un bon livre jeunesse fonctionne aussi avec les adultes ( lisez "Le passeur" de Loïs Lowry !", ou "l'île du temps perdu" de Sylvana Gandolfi...), Même un album pour tout-petits peut être agréable pour les grands.
Bon, le problème, maintenant, à force de décortiquer les récits, de repérer les leurres, les pièges, c’est que je devine la fin de TOUS les films policiers. Et moi, j’aimais bien les films policiers…

2 Comments:

Anonymous Anonyme said...

C'est vrai que ça doit pas être facile..
L'écriture en elle même n'est pas évidente. Avant de me mettre à écrire mon blog, je me suis demandée si j'allais "savoir" écrire. C'est une question bête, mais l'écriture (surtout quand elle est fait pour être lu derrière) c'est une question de confiance en soi... J'aimerai me mettre à écrire plus sérieusement, des histoires, des nouvelles.. Mais j'ai un mal fou à m'y mettre, parce que j'ai souvent peur de mal faire! (toujours ce fichu problème de confiance!) Alors si je devait me mettre à écrire des histoires pour enfants...

Enfin tout ça pour dire qu'elles sont belles tes histoires M'ame kiki...
Et que je crois que t'as vraiment trouvé ta voie...
J'aimerai en faire autant...

2:16 PM  
Blogger l'écrivaillonnne said...

C'est pas que c'est difficile, c'est que ce n'est pas si spontané que ça...
J'ai souvent entendu ce manque de confiance envers l'écriture : on a envie mais on n'ose pas. Comme si l'écrit devait être plus pertinent que le langage oral... Je ne sais pas , c'est au nom du vieil adage, les paroles partent, les écrits restent"...Mais c'est pas vrai. les paroles peuvent être figées dans l'esprit pour toujours et les lettres se perdent, se déchirent, les blogs se dissolvent...
Je n'essaie pas de dire plus ni mieux quand j'écris que quand je parle. C'est juste différent.
Faut oser ! Et oublier qu'on va être lu !

2:51 PM  

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